Page 276 - Les Peseurs Jurés de Marseille
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L’incroyable odyssée de Jean Louis Nannini !


                                        Au début des années 1950, la démolition des matériels militaires
                                  allemands installés sur les îles Pomègues et Ratonneau (en face de
                                  Marseille) était attribuée à une entreprise toulonnaise de récupération,
                                  pour le compte de ferrailleurs italiens.
                                        La taxation forfaitaire des droits de douane ayant été jugée trop
                                  importante, l’entreprise demanda aux peseurs jurés de commerce de la
                                  ville de Marseille de peser tous les métaux pouvant être récupérés dans ces
                                  îles.
                                        Le vendredi matin, après un voyage à bord de la vedette assurant le
                                  trajet entre le Vieux Port et le Frioul, accompagné d’un porte-romaine, j’ai
                                  effectué les différents pesages, à l’aide d’une bascule et d’un peson en
                                  l’air, et ce jusqu’au soir.
                                        Bien entendu, précaution avait été prise de peser séparément les dif-
                                  férents métaux trouvés sur place : cuivre, chrome, laiton, plomb, bronze et
                                  autres ferrailles....
                                        Ce jour là, une violente tempête s’est abattue sur Marseille et sa
                                  rade, empêchant totalement, un retour par bateau vers la ville.
                                        Heureusement un téléphone étant disponible, le bureau central des
                                  peseurs jurés fut immédiatement averti de bien vouloir prévenir la famille
                                  du porte-romaine ainsi que mes parents.
                                        Les ouvriers de l’entreprise de démolition acceptèrent de partager
                                  leur repas avec nous deux et un gardien, logeant dans ces îles, nous héber-
                                  gea pour la nuit.
                                        Le lendemain, nous avons pu retourner au Vieux Port, la tempête
                                  s’étant quelque peu assagie durant la nuit; je fus remplacé par un autre col-
                                  lègue et ainsi de suite pendant plusieurs jours.
                                        Cerise amère cette fois sur le gâteau, à la fin de l’opération, les fer-
                                  railleurs italiens emportèrent nuitamment nos bascules et refusèrent de
                                  régler les droits de pesage.






                                     “Antique vent de la mer
                                     qui ne semble souffler
                                     que pour la roche originelle.
                                     Pur espace
                                     S’engouffrant de très loin
                                     par rafales...”.


                                               Rainer Maria Rilke
                                                (Chant de la Mer)










                                                                                                   Iles du Château d’If et du Frioul.  Photos XDR
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