Page 84 - Les Peseurs Jurés de Marseille
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Il était préconisé de conserver entre  camarades de même âge et plus
                                  particulièrement du même examen une amitié et une sympathie qui devaient
                                  se manifester toute une vie commune.
                                        Les peseurs devaient s’en tenir avec les employés au rapport de ser-
                                  vice ; n’être familier sous aucun prétexte et rester dans les limites de la
                                  politesse la plus rigoureuse.
                                        Les peseurs et les portefaix travaillaient souvent ensemble et ce pen-
                                  dant de longues journées durant les différentes opérations de pesage ; cela
                                  impliquait entre eux certaines règles de sociabilité et de politesse aux-
                                  quelles il était dangereux pour les uns et pour les autres de se soustraire.
                                        Le rôle même du peseur qui devait accomplir sa fonction d’arbitre
                                  et de juge impartial nécessitait de sa part une fermeté et une dignité vis à
                                  vis des portefaix qui ne devaient jamais se démentir.
                                        Le peseur devait s’habituer dès sa première opération de pesage sur
                                  quai, à imposer aux portefaix un pesage normal et rationnel; afin que le
                                  peseur ait le temps absolument indispensable au coup de boulon pour
                                  déterminer le poids exact.
                                        Il fallait veiller à ce que les portefaix ne déposent pas le colis avant
                                  d’avoir entendu le peseur annoncer le poids, qu’ils préparent l’opération
                                  en gardant toujours la place nécessaire au pesage, les peseurs avaient en
                                  effet l’entière responsabilité du pesage et ne devaient tolérer aucun abus.
                                        La manière lente permettait toujours d’effectuer l’opération avec la
                                  perfection la plus absolue.
                                        M. Honnorat, maire de Marseille de 1855 à 1859, soutenait dans un
                                  rapport destiné au Préfet, le privilège des numéros d’ordre. Car “les plus
                                  anciens y trouvent, il est vrai, l’avantage d’effectuer des opérations plus lucra-
                                  tives, mais chacun d’eux a l’espoir d’en profiter à son tour, et ce stimulant atti-
                                  re et maintient au bureau un nombre toujours suffisant de peseurs, beaucoup
                                  mieux que ne pourraient le faire les instructions les plus formelles  (54) ”.
                                        Jusqu’en 1866, les petits bureaux dénommés “postes” concouraient
                                  à la division du travail. De plus ces postes étaient spécialement desservis
                                  à tour de rôle par les peseurs intermédiaires et leur permettaient ainsi de
                                  compter sur des bénéfices honorables.
                                        A cette date les postes furent supprimés et les anciens peseurs
                                  gagnèrent à cette suppression le choix sur la totalité du travail.
                                        En ce qui concerne les postes, les peseurs de ces bureaux ne pou-
                                  vaient faire usage de romaines supérieures à 360 livres  (55)  et peser des par-
                                  ties de marchandises au-delà de 40 quintaux  (56) .
                                        On comprend que dans ces limites étroites, ces bureaux devaient
                                  devenir une entrave pour le commerce au fur et à mesure de l’extension de
                                  la ville et du développement des opérations de négoce.
                                        C’étaient les postes de la place Vivaux, de la rue de Lorette et de
                                  Rive Neuve ; le poste de Vivaux qui avait 5 titulaires, n’était plus occupé
                                  que par un seul peseur qui y gagnait 50 à 60 francs par mois.
                                        Celui de Lorette, qui avait été créé pour desservir les nombreuses
                                  tanneries et raffineries qui existaient dans ce quartier n’eut plus de raison
                                  d’être après le percement de la rue de la République.
                                        Le peseur qui y était entretenu, obligé d’y avoir un porte-romaine et
                                  de payer la location du bureau, n’y faisait plus ses frais, le poste de Rive

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